Le philosophe qui n'était pas sage : deux destins qui s’affrontent, deux conceptions de la vie que tout oppose…
La forêt tropicale semblait retenir son souffle dans la chaleur moite du crépuscule. Assise devant l’entrée de sa hutte, Elianta tourna les yeux vers Sandro qui s’avançait. Pourquoi ce mystérieux étranger, que l’on disait philosophe, s’acharnait-il à détruire secrètement la paix et la sérénité de sa tribu ? Elle ne reconnaissait plus ses proches, ne comprenait plus leurs réactions… D’heure en heure, Elianta sentait monter en elle sa détermination à protéger son peuple. Jamais elle ne laisserait cet homme jouer avec le bonheur des siens.
Une histoire satirique qui nous interpelle : notre société permet-elle vraiment à l’homme d’être heureux ?
Ce que j'ai pensé du livre
J’apprécie les romans de Laurent Gounelle tant pour la légèreté de sa plume que la profondeur de ses réflexions. Mais cette fois, j’ai un gros coup de cœur pour le livre que je vous présente aujourd’hui : le philosophe qui n’était pas sage.
Ce conte satirique révèle avec humour l’extrême perversion de notre société actuelle.
Il nous amène à réfléchir sur notre mode de vie, notre rapport à la nature, nos relations aves les autres, nos peurs, notre perpétuelle insatisfaction, notre besoin de posséder, d’être le plus beau, le meilleur, le plus fort…
Comment en sommes-nous arrivés là ? Et si c’était l’œuvre d’une poignée d’individus avides de pouvoir et à l’égo surdimensionné ? Réussirons-nous à renouer avec l’essentiel et à goûter de nouveau au bonheur ?
Un livre que je recommande à tous ceux qui veulent ouvrir les yeux sur notre monde, en passant un délicieux moment de détente.
Extrait du livre
Krakus et ses hommes cherchent de quelle manière pervertir les Indiens afin qu’ils se coupent de leur être.
Krakus et Alfonso :
– L’autre jour, il me parlait de Descartes.
– De qui ?
– Descartes. Un philosophe français, parait-il. Il est mort, je crois. Il a dit un jour : « Je pense, donc je suis. » Sandro dit que c’est des conneries.
– Des conneries ?
– Ouais. Il dit qu’au contraire nos pensées nous empêchent parfois d’être.
– D’être quoi ?
– D’être tout court.
– Ouh, là… Sandro, il doit fumer en cachette des trucs d’Eliana…
– Non, c’est simple, en fait. Parfois, t’es tellement dans tes pensées que tu vois plus ce qu’il y a autour de toi, t’écoutes plus ce qu’on dit, tu sens plus rien. Donc, finalement, c’est comme si t’étais débranché de toi-même. Et Sandro dit que tes pensées ne sont pas la réalité. Quant t’es dans tes pensées, t’es comme dans un film, mais t’es pas dans ta vie. Donc, finalement, plus tu penses, et moins tu es.
Krakus sortit sa gourde et but une gorgée d’eau. Alfonso fit la moue.
– Mouais…
– Non, c’est pas fumeux, je t’assure.
– Bon, et quel rapport avec les mômes ?
– Eh bien, je me suis dit qu’on allait apprendre aux mômes, dès le plus jeune âge, à être à côté de leur vie. On va les conditionner à être uniquement dans les pensées, dans le mental, quoi. On va les enfermer dans leur mental, ne s’adressant qu’au mental, et les empêcher d’utiliser autre chose que le mental. On va leur enseigner des milliards de choses au niveau mental, et on va rien leur apprendre aux autres niveaux.
– C’est quoi, les autres niveaux ?
– Eh bien, Sandro dit que c’est apprendre à être bien dans sa peau, à l’écoute de son corps, apprendre à se connaitre, à s’aimer, à avoir confiance en soi, à gérer ses émotions, apprendre à communiquer avec les autres, à les comprendre, savoir écouter, convaincre, se faire respecter, gérer les relations, résoudre ses conflits, comprendre ses peurs et aller au-delà, apprendre à apprécier la vie, à être serein… Bref, tout ce qui te permet de t’épanouir, quoi.
– Ah ouais ?
Alfonso sortit une feuille de coca et la mit dans sa bouche.
– Et non seulement on va pas leur enseigner ça mais en plus, on va les empêcher de pouvoir l’apprendre en dehors de l’école. Il faut pas qu’ils puissent se rééquilibrer le soir.
– Ca, ça va pas être facile…
– Si. On va contrôler leur temps libre.
– Contrôler leur temps libre ?
– Oui, on va leur donner tellement de trucs à faire tout seuls après l’école – toujours sur le plan mental, bien sûr – qu’ils n’auront plus le temps d’expérimenter des choses par eux-mêmes, de se frotter à la vie, de rêver, de rencontrer du monde…
– Ah ouais…
Krakus remit son chapeau. C’était quand même mieux que le soleil sur le crâne.
– D’ailleurs, à ce propos, on va bien sûr leur interdire de parler en classe, tout comme on va leur interdire de bouger. Ils seront obligés de rester assis, immobiles, sans communiquer. Ils resteront là, à recevoir des informations mentales à longueur de journée. Interdit d’échanger, d’éclater de rire, de pleurer. On va leur bourrer le crâne de trucs à apprendre par coeur sans se poser de questions.
– A mon avis, ça marchera pas, ils vont se rebeller, les gamins.
– T’en fais pas. On fera croire à tout le monde que c’est bon pour eux. Les mômes seront bien obligés de suivre.
– Oh, là, là…
– On va aussi les garder pour le repas de midi et les obliger à manger à toute allure.
– Manger à toute allure ? Ben, pourquoi ?
– Il ne faut pas leur laisser le temps de savourer chaque bouchée, ressentir un bien-être, puis l’arrivée de la satiété. Il faut les couper de leur corps, que manger devienne une activité qu’ils pratiquent à toute vitesse sans rien ressentir,
– C’est chaud, ton truc.
– Ouais. Très chaud. Et on va encore pousser le bouchon un peu plus loin.
– Arrête…
– On va sabrer complètement leur confiance en soi : en classe, on va s’arranger pour jamais les valoriser, mais aussi contraire pointer du doigt la moindre erreur, la moindre petite faute… À longueur de journée.
– La maitresse acceptera jamais.
– C’est presque fait !
– Non ?!
– Si.
– Comment t’as fait ?
– Je lui ai fait croire que, si elle les complimentait, ils s’endormiraient sur leurs lauriers. Alors que, en réalité, c’est le contraire, bien sûr.
– Et elle a gobé ?
– Pas tout de suite. Elle a protesté en disant qu’elle connaissaient les enfants mieux que moi. Je lui ai répondu : « Peut-être, mais c’est moi qui fais le programme. » Chacun son rôle.
– Elle a cédé ?
– Disons qu’il a d’abord fallu que j’en appelle à Descartes.
– Qu’est-ce que tu lui as dit ?
– Je pense donc tu suis.
Du même auteur :
Vous avez aimé l'exraire du livre "le philosophe qui n'était pas sage" ? Vous pourriez être intéressés par la lecture du pouvoir divin de l'homme ou encore de la petite âme et le soleil.
Je commence à le voir partout Laurent, est-ce un signe ? XD
Merci pour cet article découverte !
Hé hé ! Qui sait ?!
Les livres de Laurent Gounelle ont été mis sur mon chemin grâce aux boîtes à livres…
J’adore ce concept, et j’adore tomber sur des petites pépites comme celui-ci ! 😀